L’éducation des adultes au service de l’autonomisation des femmes : l’expérience de l’association Assala
Algérie
Le mouvement associatif en Algérie et l’association ASSALA
Les organisations de la société civile sont nombreuses et variés en Algérie. Le mouvement associatif existe depuis fort longtemps sous différentes formes. Une des plus anciennes organisations de la société civile, c’est les comités de village « Tajmaat », qui représentait les sages du village. Constitués exclusivement des hommes, qui géraient et gèrent encore les affaires de la communauté dans de nombreux villages en Algérie. « Tajmaat » est une forme d’agora où se discutent aussi bien les problèmes du village (les routes, l’accès à l’eau…) que des problèmes sociaux et où s’organise l’entraide « Touisa » notamment pour les aspects liés à l’agriculture ou le bâtis.
Parmi les plus anciennes d’association, il y’a eu également les associations dites religieuses (zaouias, l’associations des oulémas musulmans…), les corporations de métiers (barbiers, couturiers…) et les associations culturelles (exemple de Rachidia de Canstantine 1902) le sport (le cercle de Saleh Bey de Constantine).
Après le fait colonial, entre 1962 à ce jour, le paysage associatif a évolué avec l’évolution du cadre juridique. Parmi les jalons les plus important de cette évolution, deux dates importantes :
- 1990 qui a vu naitre la loi 90-31 qui a fortement simplifié la création des associations et suite à la promulgation de laquelle il y’a eu donc une explosion du nombre d’association. En effet, plus de 50 000 associations ont vu le jour.
- 2012 qui a été marquée par l’adoption de la loi 12-06 qui a apporté plus de facilitation notamment au niveau local (communes) et fait qu’aujourd’hui, on parle de 100 000 associations.
Il n’y a pas que le nombre qui a augmenté, les domaines d’actions se sont également multipliés.
Le ministère de l’intérieur et des collectivités locales reconnait au moins 18 thématiques :
- Professionnelles
- Religieuses
- Sport & Education physique
- Arts et culture
- Parents d’élèves
- Sciences et Technologies
- Comités de quartiers
- Environnement
- Handicapés et inadaptés
- Consommateurs
- Jeunesse & enfance
- Tourisme et Loisirs
- Retraités
- Femmes
- Solidarité & Bienfaisance
- Secours
- Santé & Médecine
- Anciens élèves & Etudiants
Assala pour la promotion de la famille et jeunes est une association locale de la wilaya de Djelfa créée en 1997, constitué essentiellement de femmes. Elle est à caractère humanitaire et sociale avec une vision développent durable. Elle œuvre pour la lutte contre la violence à l'égard des femmes, l’égalité des chances, l'entrepreneuriat féminin et la création d’espaces pour l’éducation dédiés aux femmes, aux enfants, jeunes et personnes en situation de handicap.
Elle a pour mission :
- Améliorer la situation sociale des femmes
- Appuyer et renforcer les femmes pour s’autonomiser sur le plan financier via l’insertion professionnelle et le développement de l’esprit entrepreneurial
- Offrir un espace et des programmes de formation et d’alphabétisation pour les femmes
- Développer des formations de formatrices et animatrices d’associations de la région mais aussi du grand sud pour améliorer leurs performances et leurs efficacités.
- Sensibiliser les femmes rurales et nomades vers l’intégration dans l’économie nationale et accroître leur visibilité sur le marché
- Mettre en avant le rôle des femmes rurales et nomades productrices dans le développement économique local et durable
- Promouvoir l’hygiène individuelle et collective destinés à prévenir la maladie et maintenir la bonne santé
A ses débuts, l’association a surtout focaliser sur de petites actions de sensibilisation sur la prévention des maladies, les démarches pour l’obtention d’emploi, l’appui aux sans domiciles, la réinsertion des ex-détenus, lutte contre la violence dans les stades… Ils s’agissaient plus d’actions ponctuelles que des projets ou services qui s’inscrivent dans le temps. Le manque de moyens et d’expériences des membres en ce temps ne permettaient pas de réaliser plus, même si l’association avait déjà un bon ancrage local et travailler en partenariat avec les autorités locales.
En 2007, La rencontre avec le programme ONG2 du ministère de la solidarité nationale réalisé en partenariat avec la délégation de l’Union Européenne en Algérie, a eu un grand impact sur l’association. Il a permis à des membres de l’association, notamment la présidente, de se former à l’élaboration et gestion de projet. Ce qui a permis de participer au premier appel à projet de ce programme et de réaliser un premier projet suite à sa sélection. Il s’agit du projet de création d’activités génératrices de revenus.
Le projet consistait à appuyer 56 femmes identifiées par l’association, pour la création de micro-entreprises et ou des coopératives afin de leur permettre d’avoir des revenus et de réduire les inégalités sociales et économiques.
Le projet a apporté une aide financière pour l’achat d’équipement et de la matière première et a prodigué des formations notamment en création et gestion d’activités génératrice de revenues/micro-entreprises et en marketing.
Ce projet, a permis à l’association d’avoir des actions plus impactantes et plus stratégiques grâce à la maitrise de l’approche projet. Il a été également très structurant, car il a permis d’acquérir des équipements mais aussi plus de notoriété au niveau local, auprès de la population et des autorités locales qui nous ont octroyé un magnifique local dans la ville de Djelfa.
Tout cela fut possible, grâce à l’accompagnement et au suivi rigoureux du programme ONGII. Car au-delà d’écrire un projet, les missions de suivi et les formations ont permis à l’association d’améliorer sa gestion administrative et financière et d’enrichir son réseau grâce aux diverses rencontres avec des associations de tout le pays et des experts de valeurs.
Cet encadrement, nous a valu la réussite de notre projet qui a été classé parmi les premiers avec des indicateurs de performances dont que nous n’aurions jamais cru pouvoir atteindre au préalable.
Suite à cela, l’association a élargi cette action pour développer la confiance en soi et l’esprit entrepreneurial chez les femmes des zones rurales, les femmes nomades, les femmes en prisons en plus des femmes de la ville de Djelfa. Elle a pu par ailleurs, élaborer et réaliser 2 projets qui avaient pour objectifs la lutte contre la violence à l’égard des femmes par la création d’un centre d’information, de communication et de plaidoyer et la mise en place d’un espace de prise en charge des femmes, jeunes filles et petites filles victime de violence.
Delà, l’association a pu monter plusieurs projets autour de l’alphabétisation des femmes par l’apprentissage des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), les outils GED genre et développement, la protection de l’environnement et autres. En plus de l’appui de la wilaya et de la commune de Djelfa, il a été possible de réaliser ces projets grâce à des financements obtenus dans le cadre d’appel à propositions internationaux notamment de l’ambassade du Canada (FCIL, fonds canadien pour les initiatives locales), l’ambassade de France, la délégation de l’Union Européenne, GIZ, Dynamo International pour ne citer que ceux-là.
Par ailleurs, au-delà des financement l’association a développé plusieurs partenariats, notamment avec la direction de l’action sociale, la direction de la formation professionnelle, la commune de Djelfa et les services agricoles. Elle a également pu devenir membre du réseau international des travailleurs sociaux de rue et de l'association international de formation AIFRIS.
Autre impact important, c’est l’augmentation de la base sociale de l’association, la coopération avec l’université de Djelfa et les différents dispositifs et programmes mis en place pour les femmes rurales productrices.
L’éducation des adultes,
L’association a développé plusieurs services soutien scolaires, classe d’insertion pour les jeunes en situation de handicap des classes d’alphabétisation et des activités de sensibilisation dans divers domaines.
L’éducation des adultes a été et est un facteur essentiel pour la réussite des AGR (activité génératrice de revenu) développer par les femmes qui ont bénéficié du soutien des projets de l’association, depuis le premier projet de 2007.
Les premières thématiques développées sont la création et la gestion de microentreprises. L’association a en parallèle organisé pour elles des rencontres avec les dispositifs d’appui à l’auto-emploi et des rencontres d’information sur le projet qui ont permis à ses femmes de rencontrer des personnes ressources et des consultants du domaines qui ont adoptés un langage et pris le temps nécessaire ce qui leur a permis de comprendre mieux et parfois découvrir leurs droits et les opportunités mis à leurs dispositions. Ce fut, également l’occasion de se rencontrer entre elles, de s’écouter et ainsi dédramatiser leur situation qu’elles retrouvent l’une chez l’autres.
Un saut qualitatif a été enregistré dans les services d’éducation et d’apprentissage des adultes de Assala, suite à son partenariat avec DVV International. En effet, cela lui a ouvert d’autres horizons notamment en termes de pédagogie mais aussi de thématiques. L’innovation première ceux sont les approches andragogiques participatives inclusives, cas de l’approche sémio didactique que l’association a pu acquérir grâce à une action sur l’utilisation durable des plantes aromatiques et médicinales soutenue par DVV International qui a offert un distillateur d’apprentissage et invité une formatrice qui enseigne la distillation selon l’approche sémio didactique. A noter que cette formation a profité à un public mixtes hétérogène, constitué de jeunes universitaires et de femmes rurales pour la plupart non lettrées issues des zones d’ombre de la région de Djelfa. Au-delà de la technique et de l’approche pédagogique utilisée, la formation fut l’occasion de sensibiliser et d’informer ces bénéficiaires sur l’importances de ne pas détruire la flore locale et de faire attention aux changements climatiques et leur rôle dans la lutte contre la désertification, la protection de la biodiversité….
Depuis, l’association réfléchi à revoir ses approches d’enseignement, notamment en ce qui concerne l’alphabétisation pour adultes.
Conclusion
Assala, comme le mouvement associatif algérien, a évolué avec le temps et cela surtout grâce à l’investissement dans la formation, les partenariats et la pratique de projets.
Aujourd’hui, Assala, via ses membres et notamment la présidente tente de restituer et de donner ce savoir à la société civile et cela par la participation à l’observatoire de la société civile, notamment le travail avec DVV International, qui permet d’impliquer de manière plus efficace l’Adulte dans le développement et dans la concrétisation des ODD.